

The Little Mosque
The Little Mosque
Video transcript
Ear for Trouble
During Ramadan, Amaar comes to realize that those fasting aren´t exactly behaving in a neighbourly way, so he challenges the congregation to give up lying, gossiping and getting angry. The community enthusiastically agrees to his noble idea, but Amaar´s stipulations prove difficult to abide by for some.
Production year: 2007
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YASIR ET AMAAR sont ensemble dans la mosquée. YASIR tente d'ouvrir une porte sans succès.
YASIR
Je crois voir le problème.
AMAAR
Génial. Qu'est-ce que c'est?
YASIR
La poignée ne tourne pas.
AMAAR
Ça, j'avais remarqué.
YASIR
C'est pas un problème.
Je sais ce qu'il faut faire.
YASIR reprend la poignée et force pour la débloquer.
AMAAR
Ah, ça marche toujours pas.
Pourquoi j'y avais pas pensé?
YASIR
Parce que vous n'êtes pas
un professionnel.
YASIR déploie encore plus d'efforts, sans succès.
AMAAR
Yasir, votre tête ne va pas
exploser, j'espère?
Je viens de nettoyer par terre.
YASIR
C'est rien comparé à quand
j'ouvre un pot d'olives.
AMAAR
Je déteste les olives.
YASIR
C'est pas le problème, Amaar.
AMAAR
Yasir, pourquoi
vous n'allez pas chercher
votre boîte à outils
ou peut-être un bidon d'huile?
YASIR
(Expirant longuement)
Vous savez comment
on appelle les gens
comme vous
dans le monde du bâtiment?
AMAAR
Utiles? Logiques? Rationnels?
YASIR
Des dégonflés.
Si je mets de l'huile
sur cette chose,
je peux aussi bien dire:
Je laisse tomber.
Je ne suis plus un homme.
AMAAR
Vous ne voulez pas
aller à votre bureau
chercher votre boîte à outils.
YASIR
C'est pas faux.
Je fais une autre tentative.
YASIR s'en prend de nouveau à la poignée de la porte qui finit par s'ouvrir. YASIR tombe sur le dos, la poignée dans la main.
YASIR
(Tombant à la renverse)
Ah!
AMAAR
Vous voulez que je vous aide
à vous relever
ou vous ne serez plus un homme?
YASIR
Oui, je veux bien
un coup de main.
Générique d'ouverture
Titre :
La petite mosquée dans la prairie
Les murs ont des oreilles
À la prière du vendredi, AMAAR fait son sermon en tant qu'imam devant la communauté musulmane de Mercy.
AMAAR
Ainsi, le mois de ramadan
est vraiment
un moment sacré
dans l'année musulmane.
Il ne s'agit pas
seulement de jeûner.
Les mensonges, les ragots,
la colère.
Vous devez éviter tout cela.
Ce qui n'est pas facile
quand votre taux de sucre
dans le sang chute.
(Propos en langue étrangère)
Assalam alaykum.
TOUS
(Propos en langue étrangère)
Alaykum salam.
Après la prière, les membres de la communauté se retrouvent à l'extérieur. AMAAR en profite pour saluer tout le monde. BABER s'approche d'AMAAR.
BABER
Tiens, tiens,
un bon sermon pour une fois.
AMAAR
Oui, j'ai ressenti moins
de crispation
de votre côté de la pièce.
YASIR, SARAH et leur fille RAYYAN se joignent à BABER et AMAAR.
BABER
C'est tout à fait en phase
avec les gens alentour.
(S'adressant à YASIR)
Une règle contre le mensonge,
pas de chance
pour les entrepreneurs.
YASIR
Ah, mais tout ressemble à une
règle si c'est hors contexte.
BABER
Sarah, s'il n'y a plus
de ragot, comment tu vas vivre?
SARAH
Oh, je t'en prie.
Si tu trouves que je raconte
des ragots,
tu devrais entendre-
RAYYAN
Maman, ça, c'est un ragot.
SARAH
Parler dans le dos d'autrui,
c'est automatiquement un ragot?
YASIR
(Menant SARAH plus loin)
Oui, oui, oui.
Allez, on va marcher.
AMAAR
Tu sais, Baber,
dans ce sermon,
j'ai fait allusion
à la colère.
Je me demande
à qui je pensais.
BABER
Bon, eh bien,
voyons qui va se présenter.
RAYYAN
(S'adressant à BABER)
Il t'arrive de sortir
de tes gonds de temps en temps.
BABER
Moi? C'est ridicule!
Je suis le parfait musulman.
AMAAR
J'ai aussi parlé
de vanité, Rayyan.
BABER
Je ne suis pas vaniteux,
je ne suis pas coléreux.
Vous ne m'avez jamais vu
en colère, non.
(Montant le ton)
Et vous n'aimeriez pas
quand je suis en colère.
BABER s'éloigne, laissant seuls AMAAR et RAYYAN.
AMAAR
Il est comme ça
tous les ramadans.
RAYYAN
Il est comme ça
tous les jours, eh oui.
AMAAR
Ah. Oui.
Un après-midi au restaurant de FATIMA, RAYYAN retrouve AMAAR qui consulte un catalogue.
RAYYAN
Vous savez, pour ma part, je
préfère un bon roman policier.
AMAAR
Les dons ont augmenté
ce ramadan.
Je pensais acheter
de nouveaux tapis.
RAYYAN
Oh, enfin, de nouveaux
tapis de prière.
Les vieux sont tellement usés
que je me suis écorché
les genoux.
AMAAR
Ça m'ennuierait
de vous voir quitter l'islam
parce que vos genoux sont râpés.
RAYYAN
Est-ce qu'on peut en choisir
avec des rayures?
AMAAR
Comme ça, on sera tous
sur la même rangée.
BABER s'invite à la table.
BABER
(Prenant le catalogue)
Les véritables musulmans
préfèrent les tapis unis
pour prier.
AMAAR
Essayez de le dire
six fois à l'envers.
BABER
Et pas trop doux.
Quand je me penche,
il faut qu'ils soient assez
rugueux pour écorcher ma peau.
RAYYAN
(Saisissant le catalogue)
Attends, on est là pour prier,
pas pour se flageller.
BABER
Hé, hé! Tu m'as fait
perdre ma page.
AMAAR
Wô oh! Arrêtez. Arrêtez.
Vous pourriez peut-être
vous rappeler mon sermon.
Ce... Bien, celui
que je viens de faire.
Ne pas être en colère, etc.
SARAH
Ah oui, c'est vrai.
BABER
Ah, celui-là.
AMAAR
Bien, voilà ce qu'on va faire:
celui ou celle
qui prouvera par ses actes
qu'il applique
les leçons de mon sermon
pour le ramadan
fera partie des élus
qui pourront acheter les tapis.
SARAH
Fera partie des élus?
Vous vous prenez
pour Charlton Heston?
AMAAR
Vous savez qu'on fait
des choses formidables
en gazon artificiel
de nos jours.
BABER et RAYYAN remettent sagement le catalogue en prenant un air paisible et serein.
AMAAR retourne à la mosquée et arrive à la porte fermée de son bureau. La poignée remplacée reste dans la main d'AMAAR. AMAAR va voir YASIR à l'extérieur de la mosquée.
AMAAR
Je croyais que vous deviez
réparer ma porte?
YASIR
(Tenant la poignée brisée)
Je l'ai pas fait?
AMAAR
Comme vous tenez
un bout de la porte,
j'en déduis que non.
YASIR
Je suis sur le coup.
AMAAR
Yasir, il va vraiment falloir
apprendre à dire la vérité.
YASIR
Je suis sur le coup.
AMAAR
Je suis sérieux. Si vous tenez
à votre bureau pas cher par ici,
il va falloir commencer
par agir en honnête musulman.
YASIR
Amaar, j'apprécie beaucoup
vos menaces voilées,
mais un léopard ne peut pas
effacer ses taches.
AMAAR
Il peut s'il veut
son bureau pas cher.
Je vous demande
si vous avez réparé cette porte.
YASIR
Pourquoi pas juste dire non?
AMAAR
Rien que ça? Juste dire non?
AMAAR
Ou vous pourriez dire:
«Non, mais ce sera fait vendredi.»
YASIR
Est-ce que je peux poser
une petite question?
Si j'avais jamais eu l'intention
de réparer votre porte?
AMAAR
Alors dites juste :
«J'ai jamais eu l'intention
de réparer votre porte.»
YASIR
J'ai jamais eu l'intention
de réparer votre porte.
AMAAR
C'était facile!
YASIR
Incroyable!
AMAAR
Bon, ceci étant réglé--
YASIR
C'est tout pour aujourd'hui, merci.
RAYYAN arrive pendant la discussion.
RAYYAN
(S'adressant à AMAAR)
Je suis passée
par votre bureau
et je n'ai pas trouvé
votre poignée, et vous êtes là!
AMAAR
Ne vous y mettez pas,
vous aussi.
J'en parlais déjà
avec votre père.
RAYYAN
Je suis juste venue prier
comme une bonne musulmane.
Comme une bonne musulmane prête
à acheter des tapis.
AMAAR
Je vais vous donner un point
pour prier, mais j'ôterai
un demi-point pour
cette blague sur la poignée.
RAYYAN
Oh, un demi-point!
C'est comme ce que méritent
vos sermons.
AMAAR
Un autre demi-point!
YASIR
Est-ce que je suis obligé
de rester, là?
BABER arrive à son tour.
AMAAR
(Interrompu par BABER)
Eh bien, c'est--
BABER
Je suis juste venu prier.
Cinq fois par jour
n'est jamais suffisant.
AMAAR
Ne vous fatiguez pas.
Rayyan vous a pris de vitesse.
YASIR
Tout ça, c'est très intéressant,
mais j'ai du travail.
AMAAR
Yasir...
YASIR
Rien de tout ça m'intéresse et
je vais piquer un petit somme.
AMAAR
Ah, voilà, c'est mieux.
À la mairie de Mercy, ANN, la mairesse, mange un gros sandwich dans son bureau. SARAH qui doit jeûner semble un peu envieuse.
SARAH
Mmm...
ANN
Si vous voulez un morceau,
il y a qu'à demander.
SARAH
Ah non, je ne peux rien avaler
avant le coucher du soleil.
ANN
Ah, c'est vrai, j'oubliais
que vous jeûniez.
SARAH
Je ne me plains que
depuis une semaine et demie.
ANN
Oui, je suis forte
pour ne pas entendre.
Bon sang, toute une journée
sans manger...
Quel merveilleux, merveilleux
voyage spirituel!
SARAH
En plus, je suis
censée renoncer
à un défaut de mon caractère.
ANN
Et quel est
votre défaut majeur?
Ne dites rien, laissez-moi
deviner. La paresse.
SARAH
Quoi? Mais pourquoi
vous dites ça?
ANN
L'égoïsme?
SARAH
Non.
ANN
Vous êtes désorganisée,
maladroite, pas ponctuelle.
SARAH
Je ne trouve pas ça drôle.
ANN
Oh, vous êtes sensible,
trop sensible.
SARAH
Non, je suis une commère.
Je raconte des ragots
et il faut que ça s'arrête.
ANN
Vous êtes barbante!
Non, juste des ragots. Ah!
SARAH sort du bureau en claquant la porte.
ANN
Et vous êtes
une «claqueuse» de porte.
YASIR replie sa chaise longue après avoir fait sa sieste. Le RÉVÉREND MCGEE arrive dans le jardin.
YASIR
Ah, révérend!
RÉVÉREND MCGEE
Yasir.
Vous avez l'air ensommeillé.
Vous travaillez trop.
YASIR
Je viens juste
de faire un petit somme.
RÉVÉREND MCGEE
Vraiment?
Alors là, vous m'étonnez.
YASIR
Je fais souvent
des petites siestes.
RÉVÉREND MCGEE
Non, non, vous m'étonnez
de l'avouer.
YASIR
Mais c'est grâce à Amaar.
Je suis un homme neuf.
Terminé de faire semblant,
terminé les mensonges.
RÉVÉREND MCGEE
Ah, c'est très bien.
Le droit chemin.
YASIR
Merci. Et pendant
que j'y pense, votre gilet,
brrr! C'est effroyable.
RÉVÉREND MCGEE
Trop loin sur le droit chemin.
YASIR
C'est noté.
Le soir venu, la communauté musulmane se rassemble au restaurant de FATIMA pour un repas communautaire. RAYYAN et AMAAR se servent dans les plats préparés par FATIMA.
RAYYAN
(S'adressant à AMAAR)
Le truc qui est bien avec
le fait de sauter le déjeuner,
c'est que ça donne tout le temps
d'étudier le coran.
AMAAR
Oui.
BABER
(S'approchant de RAYYAN)
Je n'ai pas
à étudier le coran,
je l'ai déjà appris
par coeur.
AMAAR
Bien sûr.
RAYYAN
Ce n'est pas
un concours, Baber.
(S'adressant à AMAAR)
Dites-lui que
ce n'est pas un concours.
BABER
Mais bien sûr que si, c'est un
concours. C'est même l'intérêt.
AMAAR
Et qui est-ce qui est le juge
de ce concours? C'est moi.
Et qui est-ce qui entre
mon plat et moi? C'est vous.
(Se servant)
Merci.
AMAAR se sert et s'éloigne
BABER
S'adressant à RAYYAN├ C'est toi qu'il regardait. [RAYYAN
Pas du tout.
AMAAR et YASIR sont assis ensemble à une table.
YASIR
Merci pour votre conseil,
frère Amaar.
Ça m'a donné beaucoup
de temps libre.
AMAAR
Manifestement,
on ne me comprend pas.
Il faut vraiment
que j'améliore mes sermons.
YASIR
Je vous suggère quelque chose,
même si je sais que
vous n'en tiendrez pas compte.
AMAAR
Faites plus court.
YASIR
Soyez sérieux.
AMAAR
Je suis sérieux.
AMAAR
Et pourquoi pas des anecdotes?
Je pourrais expliquer aux gens
que j'affronte
les mêmes difficultés qu'eux.
YASIR
Mais c'est le cas.
Vous êtes un imam.
Vous avez une vie protégée.
AMAAR
D'accord, écoutez.
Au dernier ramadan,
je suis allé donner mon sang
et ils m'ont offert un cookie,
mais je ne l'ai pas pris
parce que c'était le ramadan.
Mais... j'ai été tenté.
YASIR
Essayez plus court,
ça marchera.
AMAAR
J'ai lutté
contre la tentation.
J'ai vécu à Toronto.
Félicitations.
YASIR
Autrefois, j'étais avocat.
Il m'est arrivé de fumer.
Je me suis fait opérer
des oreilles.
YASIR
Vous étiez sourd?
AMAAR
Non!
Je me suis fait opérer.
Elles étaient... énormes.
YASIR
Vraiment?
AMAAR
Quand j'ai passé la maîtrise,
j'ai posé pour la photo
de l'école et tout le monde
s'est mis à rigoler.
YASIR
Je suis sûr que votre mère
adorait vos oreilles.
AMAAR
Non, elle a rigolé aussi.
Le problème, c'est
que la chirurgie esthétique
est formellement interdite
par l'islam, la vanité.
YASIR
Hum, hum...
Mais vous aviez
des oreilles aussi grandes
que celles d'un âne?
AMAAR
C'est pas le problème.
Ce que je veux dire,
c'est que j'étais
une véritable machine
à commettre des erreurs.
YASIR
Mais elles étaient
grandes comment?
AMAAR
Ne parlez pas de mes oreilles.
à qui j'en parlerais?
La nuit venue, YASIR se couche près de SARAH.
YASIR
Amaar s'est fait refaire
les oreilles.
SARAH
Tu es sérieux? Oh, j'ai trop
hâte de le raconter au bureau.
YASIR
Mais tu ne veux pas arrêter
les commérages?
SARAH
J'ai menti. C'est toi
qui dois pas mentir, pas moi.
Le lendemain, BABER est de nouveau à la mosquée devant le photocopieur.
BABER
Frère Amaar?
J'essaie de faire
des photocopies
pour votre école islamique
et je vais vous faire
gagner beaucoup de temps.
AMAAR
Génial. Vous faites
du bon boulot.
Soudain l'alimentation automatique du photocopieur bloque. Il n'en suffit pas plus pour faire rager BABER.
BABER
Argh! Argh!
AMAAR
Génial. Vous faites
du bon boulot.
BABER
Cette machine essaie de me
faire exploser délibérément.
AMAAR
D'accord, d'accord. Je vais
demander à Yasir de voir ça.
BABER
On va peser le pour
et le contre.
D'un côté, Yasir ne sait
pas réparer la photocopieuse,
et de l'autre,
il ne la réparera jamais.
AMAAR
À vrai dire, Yasir a beaucoup
mûri cette semaine.
Il pourrait vous apprendre
des choses.
BABER
Moi, apprendre des choses
de Yasir? On est où, là?
Dans un monde de dingue inversé?
AMAAR
Baber...
BABER
Ah oui, oui, les fleurs
poussent en rapetissant
et les glaçons
chauffent votre boisson.
AMAAR
D'accord, j'ai compris l'idée
du monde de dingue inversé.
Baber, vous vous mettez
en colère.
Si vous êtes en colère,
vous perdez un point.
BABER
Bien, mais Rayyan est venue
prier à la mosquée
trois fois seulement hier.
AMAAR
C'est un ragot,
vous perdez un point.
BABER
Je veux plus acheter
les tapis, en fait.
AMAAR
Là, vous mentez!
C'est deux points d'un coup.
RAYYAN entre à la mosquée.
RAYYAN
(Propos en langue étrangère)
Assalamu alaykoum
AMAAR
(Propos en langue étrangère)
Alaykum salam.
RAYYAN
Je viens prier.
BABER
Elle vient se rattraper
pour hier, Miss Trois-Fois.
RAYYAN
J'ai mis un bébé au monde.
BABER
Oh, vraiment?
Et ce petit bébé
s'appelle comment?
RAYYAN
Ils ne lui ont pas encore
choisi de nom.
BABER
Oh, comme c'est pratique.
RAYYAN
Je suis désolée, c'est ainsi.
AMAAR
Ça suffit, tous les deux.
AMAAR
Le concours est fini.
Vous allez devoir acheter
les tapis tous les deux.
Félicitations, vous êtes
la Commission du tapis.
BABER
Je suis le directeur.
RAYYAN
Je suis la présidente.
À la mairie, ANN se sert un café à la salle des archives.
SARAH
(Se glissant derrière ANN)
D'accord, je connais
quelque chose de savoureux,
mais je n'ai pas le droit
de le dire.
Les deux femmes se dirigent vers l'extérieur.
SARAH
(Chuchotant à l'oreille d'ANN)
D'accord, c'est à propos
de quelqu'un que je connais,
mais c'est tout
ce que je dirai.
Sur le balcon de l'hôtel de ville, ANN s'apprête à découper un ruban.
SARAH
D'accord, c'est Amaar,
la personne. C'est Amaar.
Mais je m'arrête là.
De retour dans le bureau d'ANN, SARAH ne peut tenir sa langue.
SARAH
C'est en rapport
avec le passé d'Amaar.
ANN
Que vous arrive-t-il? Vous ne
pouvez pas continuer comme ça.
SARAH
Je m'efforce
de respecter le ramadan.
ANN
Alors, plantez un arbre.
SARAH
J'ai pas le droit de jouer les
commères, alors il faut deviner.
ANN
Il a un enfant illégitime?
SARAH
Non.
ANN
Six orteils?
SARAH
Non.
ANN
Vous êtes barbante?
SARAH
Quoi?
ANN
Écoutez. Je ne peux pas jouer
à ça maintenant.
Il faut que je m'occupe
de la délégation chinoise.
Devant le bureau d'ANN, un groupe d'hommes chinois attend.
DÉLÉGUÉ CHINOIS
Mais qui est Amaar?
RAYYAN et BABER se croisent dans la rue sur le chemin de la mosquée.
RAYYAN
Bonjour, Baber!
Tu vas faire les courses?
BABER
Est-ce qu'Allah est
notre dieu seul et unique?
RAYYAN
Avant de commencer,
je veux que tu saches
que je suis désolée
qu'on se soit disputés.
Je suis prête
à travailler avec toi.
BABER
Oui, moi aussi.
Je suis prêt. À 200% prêt.
RAYYAN
C'est génial.
Pas mathématiquement, mais...
D'accord, alors,
on commence par où?
BABER
Hum, aucune idée.
RAYYAN
Tu n'as pas fait de liste?
BABER
Je suis le directeur. Un
directeur ne fait pas de liste.
RAYYAN
Les présidents non plus,
je te signale.
BABER
Cette organisation a
beaucoup trop de directeurs.
RAYYAN
Prenons un annuaire
téléphonique.
BABER
Je savais que
c'était une mauvaise idée
de travailler tous les deux.
À la mosquée, la poignée de porte du bureau d'AMAAR fait toujours défaut. AMAAR arrive dans le jardin où YASIR fait une sieste.
AMAAR
(Assez fort pour réveiller YASIR)
D'accord, Yasir!
Je ne peux plus le supporter.
Je sais que vous croyez avoir
trouvé le moyen idéal
qui va vous éviter
de faire quoi que ce soit ici,
mais il faut que ça cesse.
YASIR
Je ne fais qu'appliquer
ce que vous prêchez.
AMAAR
D'accord,
donc vous n'allez pas mentir.
YASIR
Exactement.
AMAAR
Si je vous demandais
de la réparer, vous me diriez?
YASIR
Non.
AMAAR
D'accord, mais si je disais
que vous n'avez pas réparé
la poignée de la porte,
est-ce que je mentirais?
YASIR
Euh... Oui?
AMAAR
Donc, si je ne mens pas,
mais si je vous demandais
demain si je disais la vérité-
YASIR
Oh là, c'est bon.
(Se levant)
D'accord, je vais le faire.
AMAAR
Et la photocopieuse.
Et mon bureau branlant.
YASIR
Je l'ai réparé, ça.
AMAAR
Avec un livre sous un pied!
YASIR
C'était un bon livre.
AMAAR
D'accord. Si je vous disais
que vous n'avez pas
réparé le bureau?
YASIR
Ça va. Je vais le faire.
AMAAR
Merci.
BABER et RAYYAN sont dans le stationnement d'un centre commercial.
BABER
Je ne t'ai jamais dit
de la fermer là-dedans.
J'ai dit qu'il vaudrait mieux
que tu ne parles pas là-dedans.
RAYYAN
Mais non, pas question.
Amaar a dit qu'on devait
travailler ensemble.
BABER
J'ai une proposition. Si
tu me laisses parler à l'homme,
tu pourras choisir les tapis.
RAYYAN
D'accord, je peux accepter.
BABER
À condition que tu prennes
un qui soit mince et dur
et qui corresponde exactement
à mes spécifications.
RAYYAN
Compris. Et quand j'ai dit que
je me tairais dans le magasin,
je voulais plutôt dire que
c'est moi qui allais négocier.
BABER
Tu changes déjà la donne
alors qu'on vient d'arriver.
RAYYAN
Que vas-tu faire?
Te croiser les bras
en attendant qu'on fasse
ce que tu veux?
BABER
Pas me croiser les bras.
Je vais mettre les mains
sur les hanches comme ça, hum!
RAYYAN
Bien, et moi,
je préfère croiser les bras.
BABER et RAYYAN restent tous les deux sur leurs positions.
SARAH marche dans un parc en parlant au téléphone avec YASIR qui répare la porte du bureau d'AMAAR.
SARAH
Pourquoi faut-il que tu m'aies
parlé des oreilles d'Amaar?
YASIR
Parce qu'elles
étaient énormes!
J'ai pas été assez clair?
Même sa mère se moquait de lui.
SARAH
Ma journée au bureau est
exactement ce que je pensais.
J'avais envie de tout dire au maire!
Et je crois qu'on vient de
perdre un marché avec la Chine.
YASIR
Écoute, chérie, chacun de nous
est appelé à s'améliorer.
Moi, par exemple,
je m'abstiens de mentir.
SARAH
Pour toi, c'est amusant.
Ça te sort du boulot.
Moi, c'est l'horreur!
YASIR
Je travaille.
Qu'est-ce que tu dirais
si je te racontais
que je suis en train de réparer
une poignée de porte?
SARAH
Je dirais que tu dois pas
raconter de mensonge.
Dans le stationnement du centre commercial, BABER et RAYYAN soutiennent la confrontation silencieuse.
BABER
On peut inverser? Je commence
à avoir mal aux mains.
SARAH
Bien sûr, oui.
BABER se croise les bras et RAYYAN met ses mains sur les hanches.
RAYYAN
Ça va. Écoute, c'est stupide.
Amaar pense qu'on ne peut pas
travailler ensemble.
Tu veux lui prouver
qu'il a raison?
BABER
Je ne sais pas.
Il y a des points pour ça?
RAYYAN
On est là
pour acheter un tapis,
alors on va en acheter un!
BABER
Je connais ces boutiques
de notre ancien pays.
Ce sont les hommes qui parlent!
RAYYAN
C'est très macho--
Tu as déjà acheté un tapis
dans notre ancien pays?
BABER
Non, et toi?
Oui, le 17 octobre 1987.
J'ai le reçu. Hum!
RAYYAN
Bien, alors
c'est toi qui vas parler.
Essaie juste
de rester rationnel.
BABER
Ah oui! Gagné!
RAYYAN
Ça n'a pas duré longtemps.
YASIR répare maintenant le bureau d'AMAAR.
AMAAR
Assalamu alaykum, Yasir.
YASIR
Alaykum salam, Amaar.
YASIR se relève.
AMAAR
Attendez...
Vous avez réparé la poignée?
YASIR
Oui et j'ai peint les marches.
Et maintenant,
je répare votre bureau.
AMAAR
Wow! Vous faites beaucoup plus
de travail que je ne pensais.
YASIR
Je me sens en forme après
ces quelques journées de repos.
AMAAR
De repos? Mais comment ça?
Vous ne faites jamais rien.
YASIR
Oui, mais je fais semblant
de faire quelque chose
et ça, je peux vous dire
que c'est crevant.
AMAAR
Je peux pas le croire.
Mon sermon a marché.
Quelque chose dans mon sermon
a enfin marché!
(Riant en sortant du bureau)
YASIR
Et je le mets où,
votre bouquin?
(Lisant le titre du livre)
Votre trombinoscope
de la fac... de droit...
YASIR feuillette le livre avec plaisir.
Dans le magasin de tapis, BABER regarde les tapis. Un vendeur s'approche.
VENDEUR DE TAPIS
Bonjour, mon ami! Qu'est-ce
que je peux faire pour vous?
BABER
Mon humble fille et moi-même,
nous voulons un tapis.
VENDEUR DE TAPIS
Oh, et vous en aurez
un d'une superbe qualité.
BABER
Épargnez-moi les boniments.
On veut ce qu'il y a de mieux
et au meilleur prix.
VENDEUR DE TAPIS
Oui, bien sûr.
Vous en avez un là,
très joli, pour 850$.
BABER
Vendu!
BABER
Entendu, je reviens
tout de suite.
Le vendeur s'éloigne.
RAYYAN
Qu'est-ce que
c'est que cette histoire?
BABER
Quoi?
RAYYAN
Tu devais marchander!
BABER
Vraiment?
RAYYAN
Tu n'as pas dit
que tu faisais ça
à longueur de journée?
BABER
Oui, au Pakistan, les vendeurs
de tapis connaissent mon nom.
RAYYAN
C'est pas étonnant.
BABER
Et tu penses...
qu'on aurait pu l'avoir
pour moins cher?
RAYYAN
Ne te vexe pas,
mais il a été très vicieux
avec ses arguments
de marchands de tapis.
SARAH arrive à la mosquée où YASIR est en train de réparer le photocopieur.
SARAH
Alors, c'est quoi
la belle surprise?
YASIR
Voilà. Je suis désolé
d'avoir compliqué ton ramadan,
mais j'ai quelque chose pour
toi. Tu pourras même l'encadrer.
YASIR fait une photocopie de la photo de fin d'études d'AMAAR.
SARAH
Ah?
(Regardant la photo)
Oh! Oh, mon Dieu!
On dirait que
quelqu'un lui a collé
des muffins
de chaque côté de la tête.
YASIR
Mon petit cadeau de ramadan.
Donne-le au maire
et tu seras pas obligée
de dire quoi que ce soit.
SARAH
C'est pas un ragot.]
Je peux le montrer
à tout le monde!
YASIR
Non, pas à tout le monde.
Au loin la voix d'AMAAR interrompt la discussion.
AMAAR
Oui, on se voit demain.
Très bien.
SARAH
(Glissant la copie sous un tas de feuilles)
Euh...
AMAAR
(Propos en langue étrangère)
Assalumu alaykum.
YASIR
(Propos en langue étrangère)
Alaykum salam.
AMAAR
Vous avez réparé la photocopieuse?
YASIR
Eh oui.
AMAAR
Vous m'impressionnez.
13 points.
YASIR
Pourquoi vous me donnez
des points?
AMAAR
Désolé, c'est l'habitude.
AMAAR
(S'adressant à SARAH)
Pourquoi vous me regardez
comme ça?
SARAH
Pour rien. Le ramadan,
la faim. Vous venez manger?
AMAAR
Oui, après avoir copié quelque
chose pour l'école islamique.
YASIR
Maintenant
que mon travail est fini,
comme tant d'autres avant moi,
je vais quitter cet endroit,
où je viens juste...
Je me comprends.
YASIR s'éloigne pour sortir.
SARAH
Il a vraiment très faim.
SARAH s'éloigne à son tour en scrutant le visage d'AMAAR.
AMAAR
(Soupirant)
Ah...
Au magasin de tapis, le VENDEUR revient avec une facture dans la main.
VENDEUR DE TAPIS
Mais mon ami, je croyais
qu'on avait un accord. 850.
BABER
Oui, c'est vrai, pardon--
RAYYAN
Allez...
BABER
Je veux changer notre accord.
VENDEUR DE TAPIS
Mais je vous ai
déjà fait le reçu.
BABER
Ah bon, il a déjà fait
le reçu.
RAYYAN
On paie 850 pour deux.
VENDEUR DE TAPIS
Deux!
Vous n'avez qu'à me poignarder
en plein coeur
et prendre mon portefeuille!
1100$, dernier prix.
RAYYAN
875.
VENDEUR DE TAPIS
J'ai des enfants à nourrir.
RAYYAN
Il a des enfants à nourrir.
1000$... Deux tapis.
RAYYAN
900$.
VENDEUR DE TAPIS
900$, c'est peu.
BABER
Tu lui fais de la peine!
VENDEUR DE TAPIS
C'est d'accord. Ne partez pas.
BABER
Maintenant, on lui donne
combien de pourboire, hein?
RAYYAN rit.
Les nouveaux tapis sont installés à la mosquée. AMAAR, RAYYAN et BABER sont contents de leur achat.
AMAAR
Pas mal!
En fait, je crois
que nous avons appris
que si nous mettons
deux personnes très différentes
en les mettant
dans une situation, vous avez-
RAYYAN
Deux personnes
dans une situation.
BABER
Je pense qu'on aurait dû
lui donner un pourboire.
AMAAR
Bref, je suis fier de vous.
La meilleure commission
que j'aie pu former.
RAYYAN
(Soupirant)
Ah...
AMAAR
Hein?
RAYYAN
Hum!
BABER
Pourquoi ce «Hum!»?
RAYYAN
Eh bien, il se trouve
que maintenant
que je les vois ici...
Non. Non.
Les couleurs ne collent pas.
Il faut les rapporter.
BABER
Comment je démissionne
de la commission?
AMAAR
Il suffit de me suivre.
AMAAR et BABER s'éloignent en douce.
AMAAR donne une classe d'enseignement islamique aux enfants de la communauté. Chacun tient un feuillet photocopié.
AMAAR
Les enfants, aujourd'hui,
nous allons évoquer
l'histoire du prophète Sâlih.
Un des élèves rigole.
AMAAR
Le prophète Sâlih,
que la paix soit avec lui...
L'élève se tourne et montre quelque chose aux autres élèves qui rient aussi.
AMAAR se rend vite compte que sa photo est dans toutes les copies.
AMAAR
Le cours est terminé.
AMAAR est de retour dans son bureau. YASIR frappe à sa porte ouverte. Il teste la poignée.
YASIR
Je constate que la poignée
marche toujours.
AMAAR
Je n'avais pas besoin
des 24 heures de garantie.
YASIR
Frère Amaar...
AMAAR
Appelez-moi frère Grandes
oreilles. Les enfants le font.
YASIR
Ceux de l'école coranique?
AMAAR
Non, tous les enfants.
En fait, le bruit court vite.
YASIR
Je voulais pas que des enfants
innocents voient cette photo.
C'était pour que Sarah
la montre au bureau.
Et peut-être aussi
à des amis extérieurs.
AMAAR
Ah, donc votre motivation
était pure.
YASIR
Je suis désolé.
YASIR tend une enveloppe à AMAAR.
AMAAR
Yasir, nous sommes amis.
Je n'ai pas besoin
de cadeau pour vous pardonner.
C'est chouette.
AMAAR retire une photo de YASIR de l'enveloppe.
YASIR
Wow.
Quelle coupe de cheveux atroce!
Sur la photo, YASIR, qui est aujourd'hui chauve, tente de cacher sa calvitie en ramenant ses cheveux longs sur son crâne.
YASIR
Oui, une brève faute de goût
entre 1994 et 1998.
AMAAR
Mais... Vous comprenez bien
que ce n'est pas la même chose.
Des douzaines d'enfants ont vu
ma photo, mais là...
YASIR
J'ai une idée.
YASIR a imprimé sa photo sur un t-shirt et marche en ville en l'exhibant. AMAAR marche à ses côtés.
AMAAR
Vous n'êtes pas obligé
de faire ça.
YASIR
Sincèrement, j'insiste.
(S'adressant à une passante)
Comment allez-vous?
AMAAR
D'accord, alors est-ce que
je pourrais avoir ce t-shirt,
quand vous aurez fini?
YASIR
Ne rêvez pas,
je vais le brûler.
AMAAR
Bonne idée.
Générique de fermeture